« Une jeune fille qui va bien », l’insouciance malgré tout signée Sandrine Kiberlain

par | 26 Jan 2022 | À la Une, Tasse de thé culturelle | 2 commentaires

Contenu mis à jour le 30 janvier 2023

Sandrine Kiberlain a déjà une filmographie impressionnante et ce mercredi 26 janvier marque encore une nouvelle étape dans sa carrière : sa première réalisation, Une jeune fille qui va bien, arrive dans les salles ! Je vous invite à prendre une tasse de thé culturelle avec Sandrine Kiberlain, que j’ai eu la chance de rencontrer dans le cadre du Festival International du Cinéma Indépendant de Bordeaux.

Une nouvelle corde à l'arc de Sandrine Kiberlain

L’hommage de Sandrine Kiberlain à une époque historique qui la hante

Le film démarre fort : on découvre des jeunes acteurs, face caméra, sans savoir véritablement où l’on est. Puis, le spectateur comprend qu’il se trouve au milieu d’une troupe de théâtre.

Parmi tous ces comédiens et comédiennes pleins de vie, il y a Irène (Rebecca Marder) qui rêve de devenir actrice professionnelle… C’est par elle, que l’on avance dans l’univers du film.

Mais quel univers d’ailleurs ? La réponse n’est pas immédiate… jusqu’à ce que l’on sache qu’Irène et sa famille doivent apposer la mention « juif » sur leur carte d’identité et porter l’étoile jaune…  Mesures imposées par l’occupant nazi, car nous sommes en 1942…

Pour autant, la guerre et l’Occupation ne sont jamais montrés.

Pourquoi ce choix ?

« Il fallait, pour traiter cette période que je trouve un angle, explique Sandrine Kiberlain, que nous avons eu la chance de rencontrer il y a quelques mois, en marge du Festival International du Cinéma Indépendant de Bordeaux. Un point de vue singulier qui [m’était] très personnel, parce que cela a déjà été tant traité, si bien traité ou mal traité (c’est un sujet ou une période historique qui me hante) (…), [que] je trouvais presque réducteur de rappeler aux gens ce que l’on sait déjà (…).

Le point de vue était vraiment de faire le film par son prisme à elle, par le prisme d’une jeune fille de 19 ans, 20 ans : ce qu’elle veut voir, ce qu’elle ne veut pas voir, la façon qu’elle a, d’être pressée, je suis tout le temps en mouvements avec elle, et son quotidien ».

La néo cinéaste applique en cela le précepte d’Agnès Varda qui stipule, comme elle le définit d’ailleurs très bien, qu’ « en ne montrant pas, on donne envie de voir ».

Mener à bien ce projet était une nécessité pour elle, comme elle le confie : « le fait d’avoir fait le film, le fait que mes grands parents ne soient pas là pour le voir, ça m’a beaucoup replongé dans le manque de questions que je ne leur pas posées, dans le manque d’informations que j’ai d’eux précisément… Honnêtement, d’avoir fait ce film, je me dis : « au moins j’aurais fait ça, j’aurais fait ça à ma façon, j’aurais parler de ça, j’aurais raconté ça ».

Cela donne un film puissant qui nous fait véritablement ressentir l’insouciance de la jeunesse, insouciance d’autant plus précieuse que la tragédie est là, en filigrane, tout proche…
On croque la vie d’Irène à pleines dents : les moments en famille, les amours, le théâtre… Tant que cela est encore possible…

Sandrine Kiberlain nous montre magnifiquement « l’avant : l’avant absurdité, l’avant que cela bascule, l’avant rafles »

Elle questionne le ressenti que nous aurions dans des circonstances aussi terribles et folles : qu’aurions-nous fait ? Les personnages font ainsi des choix différents, comme nous l’aurions sans doute fait… et cela donne beaucoup de corps au récit.

On est surtout très proches d’Irène, on vit avec elle, en partageant toute son intensité, sa fragilité et surtout sa passion pour le théâtre.

Rebecca Marder dans "Une jeune qui va bien" de Sandrine Kiberlain.

Rebecca Marder dans le rôle d’Irène © Jérôme Prébois.

Une déclaration d’amour au théâtre et au cinéma

Le film est d’ailleurs une véritable déclaration d’amour à l’art de la scène.

«On ne parle jamais mieux de ce l’on connaît et de ce qu’on aime détaille Sandrine Kiberlain. Moi, ma passion, c’est le théâtre, et le cinéma, et le jeu surtout.

Je me suis reprojetée en fait, je me suis dit : « je veux vraiment parler de l’élan vital, de la force de vie, de la joie d’une vie qui commence, avec toute avec tout à découvrir… » Quand j’ai inventé Irène (…), inévitablement, j’en ai fait une passionnée de théâtre, une jeune fille qui veut devenir actrice.

 

Cela sert l’histoire je pense, parce que, c’est plusieurs vies en une, c’est une façon d’échapper à la réalité aussi : le théâtre [aide Irène] à échapper à ce qu’elle pressent, elle met même du théâtre partout (…) :elle met en scène ses parents, sa famille, parce qu’elle met de la vie partout (…), elle veut emmener sa famille vers sa pulsion de vie à elle ! ».

D’où cette intensité merveilleuse que l’on ressent à chaque instant !

Outre le théâtre, il y a donc le cinéma : quelles ont été les influences de la comédienne pour réaliser ce premier long métrage (en dehors d’Agnès Varda, évoquée précédemment) ?

« Cela se fait de façon complètement insidieuse nous répond-t-elle. Après, c’est vrai que je donnais une tonne de références à mes chefs opérateurs, à la chef déco, à tous les chefs de postes (…).

[C’était des] des films qui m’ont vraiment marqué comme Van Gogh de Pialat (…) pour les décors assez sobres.
Le mot d’ordre c’était « assez sobre » on va dire, sur les costumes, les décors. La couleur de l’image aussi : je voulais que ce soit ni trop froid, ni trop chaud ».

Elle trouve également de l’inspiration dans Baisers volés (1968) de Truffaut, chez Claude Sautet ou encore dans Le Temps de l’innocence (1993) de Martin Scorsese.

« Je pense que tous les metteurs en scène cherchent leur identité, ne veulent jamais quitter leur point de vue.

Moi j’avais tout le temps dans la tête de ne jamais quitter l’enjeu d’une séquence (…) mais aussi dans chaque séquence, [de] trouver le point de vue : la façon dont je voulais cadrer, amener le personnage au plus précis de ce que je voulais ».

Enfin, comment ne pas terminer sans saluer la performance de tous ces jeunes comédiens et comédiennes, tous très justes, Rebecca Marder en tête !

Elle irradie le film, de son énergie et de sa joie de vivre, au diapason de son personnage.

En définitive, tous ces éléments de qualité, mis bout à bout, font de ce film une vraie réussite, riche en émotions, à ne pas manquer !

On a déjà hâte de découvrir la suite de la carrière de Sandrine Kiberlain derrière la caméra !

 

 

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2 Commentaires

  1. Simon Eric

    Et bien voila un bel article qui donne assurément envie de voir ce premier film réalisé par Sandrine Kiberlain. L’occupation Allemande ! Sandrine Kiberlain nous en parle d’une manière différente et iconoclaste à travers les yeux d’Irène prise dans la tourmente d’une époque devenue incertaine pour les gens à l’étoile jaune, cette étole maudite.

    Jérôme Mabon aura su parfaitement nous transmettre ses sentiments quand à ce film et nous encourager a le voir. Saluons aussi cet article ponctué par les sensations et argumentations de Sandrine Kiberlain sur cette belle réalisation.

    Réponse
  2. Mabon

    Merci beaucoup Simon.

    Réponse

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