TnBA : saison 2022/2023, de la gaieté, de la parité, de la légèreté, sans déni de la réalité

par | 22 Juin 2022 | À la Une, Tasse de thé culturelle | 5 commentaires

Contenu mis à jour le 23 juin 2022

La tonalité globale de la saison 2022/2023 du TnBA, avec 30 spectacles in situ, plus un décentralisé, a été guidée par une envie de prendre du recul et des couleurs. Tous les publics, des plus jeunes aux séniors, des abonnés aux billets solidaires, devraient y trouver leur bonheur à satiété et permettre à cette belle Maison au plus noble sens du terme, de retrouver sa pleine activité d’avant COVID.

Nous chez Jugeote, c’est carrément notre tasse de thé culturelle et ça nous a mis l’eau à la bouche.

Demandez le programme du Théâtre National de Bordeaux Aquitaine !

Le TnBA affiche d’emblée ses couleurs : gaieté, légèreté et conscience

Après un week-end torride (dont un mariage par 42 degrés à l’ombre for myself), il était bon de se retrouver en ce lundi matin à la fraîche, après la pluie salvatrice de la nuit passée et d’être accueillis simplement et cordialement par Catherine Marnas, directrice du Théâtre National de Bordeaux Aquitaine, et la secrétaire générale, Florence Tournier Lavaux. La vingtaine de journalistes présents pour cette conférence de lancement de la saison 22/23, montrait que l’attente était forte en ces temps difficiles et faisait augure de bon présage. Or les dieux du théâtre ne sont jamais bien loin.

« L’Origine du monde » d’après la BD de Liv Strömquist. Par Claire-Aurore Bartolo.
Crédit photo : Fabien Pallueau

Après les chiffres de la saison 2021/2022, 21 spectacles produits ou en co-prod, un taux de remplissage quand même exceptionnel au vu des circonstances passées et actuelles (75% au lieu des 88% pré-COVID, dont 39% de moins de 30 ans), une perte de recettes de 200 000€, il s’avère que le bilan n’est pas si mauvais.

Même, si comme le souligne Catherine Marnas :

Il semble que le public ait perdu le chemin du théâtre. Et ce, depuis des années déjà. Après la lourdeur et la pesanteur de la pandémie et puis la guerre, qui ont ébranlé nos certitudes, notre énergie créatrice a été guidée par une envie de légèreté à retrouver, sans déni de la réalité.

« Libre arbitre » de Julie Bertin, avec entre autres Julie Teuf.
Crédit photo : Simon Gosselin

La saison 2022/2023 affiche déjà ses couleurs chatoyantes sur le visuel de sa programmation. La promotion et les arts, ne sont pas incompatibles, il s’agit juste d’un support supplémentaire et poétique. D’ailleurs dans le programme de la nouvelle saison, Catherine Marnas nous invite à :

Métamorphoser nos quotidiens, de les imaginer autres. Il ne s’agit pas d’une volonté d’oubli factice, facile, mais d’un changement de perspective : un regard depuis un autre point de vue. Par la poésie, l’humour, la musique, la danse, pour nous décoller de la réalité.

De L’Orestie au Collectif OS’O

Au menu :

  • L’Orestie, revue et corrigée
  • Fassbinder
  • L’Origine du Monde d’après la BD de Liv Strömquist
  • Shakespeare avec Puck et Othello
  • Pirandello
  • Hannah Arendt
  • Jean-François Sivadier
  • Mathieu Touzé
  • Frédéric Sontag
  • Nathalie Dessay
  • Charles Berling
  • Frank Manzoni
  • Julie Teuf
  • le Collectif OS’O
  • et tous les artistes compagnons seront au rendez-vous.

La ruche des compagnonnes et compagnons

Donc de la couleur, de la gaieté, de la légèreté, de la parité (17 spectacles créés par des femmes, contre 14 par des hommes, soit 57%) et de « la musique comme métaphore de prise de recul face aux évènements et d’une reprise en main de notre destin ». Soit pour la saison à venir, 5 spectacles aquitains, 20 nationaux et 4 internationaux. Des nouveautés avec la séance en matinée à 14h pour attirer plus de public.

La saison du TnBA s’ouvrira après 2 mois de travaux de réfection, mais pas d’inactivité, puisque le spectacle de tréteaux de Bénédicte Simon « Fiesta » parcourra le territoire hexagonal durant cette période.

Dès le mardi 4 octobre 2022, première de « Pour que les vents se lèvent », une réécriture de l’Orestie par l’iranien Gurshad Shaheman, mise en scène par la maîtresse des lieux, elle-même, et Nuno Cardoso (ancien directeur du théâtre national de Porto), dans un spectacle bilingue et surtitré, qui mettra en lumière les dommages collatéraux de la guerre.

"Pour que les vents se lèvent" de Gurshad Shaheman par Catherine Marnas et Nuno Cardoso

« Pour que les vents se lèvent » de Gurshad Shaheman par Catherine Marnas et Nuno Cardoso. Crédit photo : Hanna Panchenko

 

La semaine suivante (du 11 au 15 oct) on pourra découvrir la nouvelle création de Baptiste Amann, artiste-compagnon, avec sa « Salle des Fêtes », fable utopiste du « partir se mettre au vert » post-Covid. L’année dernière, lors du 75ème festival d’Avignon, il avait présenté « Des territoires-Trilogie » d’une durée de 7h, au Gymnase du Lycée Mistral en 2021.

Toujours en octobre (du 18 au 22), Nathalie Dessay à l’affiche d’une autre création, « Écho », un musical transdisciplinaire, écrit, mis en scène et performé par l’iconoclaste artiste-compagnonne, Vanassay Khamphommala, autour du chagrin d’amour, de Narcisse et de l’amour autrement.

Tout devient possible avec l’espoir d’une famille de travailleurs dans les années 70 post mai 68, avec le « Huit heures ne font pas un jour » (Épisodes 1 à 5) de Rainer Werner Fassbinder, mis en scène par Julie Deliquet (du 8 au 11 nov).

"Huit heures ne font pas un jour" de Fassbinder par Julie Deliquet

« Huit heures ne font pas un jour » de Fassbinder par Julie Deliquet. Crédit photo : Pascal Victor

 

La technologie, la magie et un univers poétique dans le spectacle tout public, « Le Bruit des Loups » d’Etienne Saglio (du 16 au 19 nov) et « L’Origine du Monde » (du 1er au 10 déc) adapté de la BD éponyme de Liv Strömquist, mise en scène de Claire-Aurore Bartolo, sur le plaisir au féminin, les tabous, la parité, sujet qui sera sûrement porté par une tournée des collèges à venir.

Toujours en décembre, une production audacieuse, un grand plateau (une distribution de 10 et 6 musiciens en alternance) et un thème passionnant avec « La réponse des Hommes » écrit et mis en scène par Tiphaine Raffier avec cette question centrale et complexe : Comment faire le bien ? Une fin de 1ère partie de saison épatante !

« La réponses des Hommes » de et par Tiphaine Raffier
Crédit photo : Simon Gosselin

Winter is coming

L’hiver 2023 du TnBA ne sera pas « celui de la colère, changée en été de gloire par le soleil d’York » (Richard III – monologue d’ouverture), mais bien celui de Shakespeare, de Pirandello, de La Tendresse, du Libre arbitre, du cirque, de la danse, des musiques et de la conscience modifiée.

Du 10 au 14 janv, le musical-narratif tout public « Je suis Puck » tiré du Songe d’Une Nuit d’Été (que votre serviteur a eu le privilège d’interpréter dans le rôle de l’artisan Gâte-bois et de la fée Papillon, mis en scène par Stéphane Aucante, en Avignon au Théâtre du Chien Qui Fume, au siècle dernier) et « Othello » dans la version de Jean-Michel Déprats, mis en scène par Jean-François Sivadier avec Cyril Bothorel dans le rôle-titre et Nicolas Bouchaud en Iago (du 22 au 25 fév).

« Othello » Shakespeare par Jean-François Sivadier.
Crédit photo : Jacques Cuinières Roger-Viollet

La collaboration avec l’ukrainienne Lucie Berelowisch, accueillie au TnBA en 2020, soit avant la guerre ou disons plutôt avant que celle-ci ne dépasse les limites du Donbass, a donné naissance à la création des « Géants de la Montagne » d’après Pirandello. « Une fête pour l’esprit et pour les yeux » décrite par le dramaturge dans l’Europe des années 30, avec la montée des fascismes et à l’horizon de la guerre (du 22 au 25 fév).

« Les Géants de la montagne » d’après Pirandello par Lucie Berelowitsch. Crédit photo : Oleksandr Kosmach

 

« La Tendresse » de Julie Berès, déjà plébiscitée par le public, explore la masculinité d’aujourd’hui et les diktats de la société, encore bien ancrés (du 17 au 21 janv).

« La Tendresse » de et par Julie Berès. Crédit photo : Axelle de Russé

On retrouvera ensuite du 31 janv au 4 fév, les 2 Julie, Julie Bertin et Julie Teuf et la Cie LE GRAND CHELEM dans « Libre arbitre », sur l’histoire vraie de Caster Semenya, athlète sud-africaine transgenre (donc suspecte), spoliée de sa victoire aux 800m féminin des Championnats du Monde d’Athlétisme de 2009 à Berlin.

« Black March » de Claire Barrabès, mise en scène de Sylvie Orcier, spectacle transdisciplinaire mêlant Cirque, Danse et Musique (du 28 fév au 3 mars).

« Black march » de Claire Barrabès et par Sylvie Orcier.
Crédit photo : Alex Gicquel

Et juste avant le printemps 2023, le seul en scène de Frank Manzoni artiste-compagnon, écrit par Simon Delgrange, nous invitera sur la planète Cerveau et la conscience modifiée, avec « Et pourtant, il gardait sa tête parfaitement immobile » du 2 au 11 mars. Le thème de la folie, de la sagesse, du puzzle des pensées, comme Peter Brook avait pu explorer en son temps la neurologie aux Bouffes du Nord, avec « L’homme qui prenait sa femme pour un chapeau » (vu à l’époque par votre serviteur en tant qu’élève comédien chez Périmony).

« Et pourtant, il gardait sa tête parfaitement immobile » de et par Frank Manzoni. Écrit par Simon Delgrange.
Crédit photo : Anne-Sophie Annese

Le sacre du Printemps

Un Sacre, juste avant celui du printemps 2023 avec un hommage à Michel Berger, Hannah Arendt la poétesse, le Festival de la ruche #3, Barbe Bleue et bien sûr tous les travaux de L’éstba (Ecole supérieure de théâtre Bordeaux Aquitaine), promotion 6 2022/2023.

Lorraine de Sagazan nous proposera du 15 au 18 mars avec « Un sacre », un rituel de danse, de pulsion de vie et un hymne à l’accompagnement des vivants et à cette « réparation » que nous voudrions tous, après les épreuves, l’absence et les dommages collatéraux du confinement, sur tous les registres, du plus lyrique au plus trivial.

« Un sacre » de Lorraine de Sagazan
Crédit photo : Christophe Raynaud de Lage

Quand Solal Bouloudnine se remémore son enfance dans le sud de la France dans les années 80, avec comme voisins saisonniers France Gall et Michel Berger (jusqu’à sa crise cardiaque, en plein match de tennis, à l’aube de ses 45 ans en 1992), la bouchère du village, le JT de FR3, c’est avec toute la tendresse, l’humour et la poésie de cet enfant du pays et fils de pieds-noirs (du 4 au 7 avril).

« Seras-tu là ? » de et avec Solal Bouloudnine.
Crédit photo : S. Bouloudnine

Si Hannah Arendt est surtout connue pour sa définition de « la banalité du mal » lors du procès Eichmann en 1961 à Jérusalem et sur sa connaissance aiguë et toujours d’actualité des Pouvoirs Autoritaires, elle a aussi laissé une trace dans les sillons de la poésie. Bérangère Warluzel, sous la direction de Charles Berling, dont la mise en scène sobre et inspirée, nous plonge par un savant montage, dans les textes connus et moins connus, les interviews et les poésies de cette très grande dame du XXème siècle, encore étudiée partout dans le Monde (du 25 au 28 avril).

« Fragments » Hannah Arendt par Charles Berling.
Crédit photo : Vincent Berenger Chateauvallon

Pour clore cette resplendissante saison du TnBA, quoi de mieux que de renouveler le beau succès du Festival de la ruche 3ème édition ? Et laisser le public entrer dans les coulisses, dans la fabrication d’un spectacle, découvrir tous les nombreux et merveilleux métiers et savoir-faire ancestraux, dans cette ruche, « cette usine à poésie » comme aime à la définir, Catherine Marnas (du 11 au 13 mai).

En clôture, et après plus de 180 représentations itinérantes, « La Barbe bleue » de Jean-Michel Rabeux, mis en scène par l’artiste-compagnon Julien Duval, va passer des tréteaux au plateau de la salle, du 23 mai au 3 juin. C’est un Hit ! Une récréation avant l’été. Ce même été, qui verra présentés au public, les travaux de fin d’année 2022/2023 de la promotion 6 de L’école supérieure de théâtre Bordeaux Aquitaine (L’éstba),

« La Barbe bleue » de Jean-Michel Rabeux, par Julien Duval, artiste compagnon. Crédit photo : Frederic Desmesure

Une école comme le TnBA et L’éstba, ne doit pas être marquée par son esthétisme. Nous devons passer d’un système rhizome (la tige souterraine et généralement horizontale de certaines plantes ndlr), à un système micellaire (un agrégat de petites molécules ndlr), comme dans les parfums, les peintures et l’eau. Et transfigurer la réalité !

Merci à Catherine Marnas pour cette riche et passionnante présentation, à Florence Tournier Lavaux et toutes les équipes du TnBA et comme toujours à Anne Quimbre.

Résas, tarifs, accessibilité :

https://www.tnba.org/saison

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5 Commentaires

  1. Joël Côté

    Très bel article ! Cette programmation donne de l éclat à la vie culturelle bordelaise.

    Réponse
    • Barreyre

      Merci beaucoup à toi Joël! Oui effectivement, cette saison prochaine du TnBA, va nous offrir une large palette de couleurs vives et gaies en cette période grise.
      Bien à toi
      Xavier B.

      Réponse
  2. Eric Simon

    17H00 : it’s time for a cup of tea mais avec Xavier ce sera une tasse de thé culturelle et j’en ai appris en cette fin d’après midi accompagné tout au long de ma lecture par Catherine Marnas et Florence Tournier Lavaux.

    Le Théâtre National de Bordeaux Aquitaine se donne les atouts pour réussir une saison 2022/2023 avec un panel de représentations tout a fait remarquable et nous pouvons apprécier l’engagement de chaque spectacle comme « La Tendresse » de Julie Berès ou « Libre arbitre » de Julie Bertin mais l’époque que nous vivons est incertaine et pleine de colère, nous avons besoin de rêver et quoi de mieux que « Un sacre » de Lorraine de Sagazan.

    Bon ! mon coup de coeur c’est le Festival de la ruche, une inspiration heureuse qui comblera les passionnés et les curieux et comparer cette ruche à une usine à poésie c’est merveilleux.
    Cet article est long mais la lecture en est rapide et passionnante car la plume de Xavier nous a fait voyager et je lui parlerai de Richard 3 si il en éprouve le besoin ce sera sa tasse de thé culturelle.

    Bravo pour ce bel article.

    Réponse
    • Barreyre

      Ah merci bien Eric! De ta part j’en suis très touché et heureux, car je sais combien Jugeote est sensible à tes retours. C’est important pour nous, d’avoir des lecteurs fidèles et inspirants comme toi. À très vite, il me semble ❤️

      Réponse
  3. Eric Simon

    Après ce très bel article de Jugeote consacré au Théâtre National de Bordeaux Aquitaine qui détaille de la plus belle des manières la lancement de la saison 2022/2023 prometteuse et enthousiasmante, nous apprenons avec inquiétude et émotion les conditions de travail violentes dégradantes et humiliantes au sein du TnBA révélées par le média Rue89Bordeaux. les salariés du TnBA épuisés et fragilisés par une pression permanente et agressive lance un mouvement social auquel nous nous associons pour que vive la culture à Bordeaux

    Réponse

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